Bien assez tôt la saignante m'aura désossé.

Bien assez tôt la saignante m'aura désossé

Bien assez tôt la saignante m'aura désossé
et je coucherai froid et lourd dans un fossé
Les membres rossés et le souffle coupé.

Quelques pelles de terres sur mon corps
pour cacher les caresses, les cicatrices,
quelques pioches affolées en désaccord
tinteront comme des cloches tentatrices.

Le sombre bourdon de ma poitrine piétine
avec peine, cogne pour briser sa prison,
sur ma tête cette couronne d'aubépine
arrache des lambeaux de peaux à foison.

Quel poignard sinistre noircira mon chapeau?
Quelle arme empoisonnée m'entrera dans la peau?

Sur les terres desséchées jaunes où le blanc
plantait ses colonnes indigos et ses rites troublants
sur ces sols qu'un soleil acide lorgne et blesse
des êtres de plumes colorés de tristesses

aux corps couverts de perles ternes rouillées
dansent dans le silence des enfers glacés
dansent aux transes noires et fouillées
sur mon cercueil de papiers froissés

éclaboussures de sang
regard luminescent
traces passées d'un dessin
remords pris de frissons

et - blanc - cassure, pâle as
putrescible lueur qu'encrasse
une colle grise qui - n'est-ce-pas - laisse
un arrière-goût borgne de Lucrèce
à l'uniforme maladroit de police
en prise avec un foutu kriss
qui n'épargnera pas l'os
de mon squelette en crosse
et dans un cimetière russe
pourrira mon corps - terminus.

Quand sur nos nuits incandescentes

Quand sur nos nuits incandescentes les phobies
descendent, capricant nos vies en les pendant,
quand sur nos vies déliquescentes les folies

des pinces de métal mordant l'os des poignets
encadré bien serré par deux vilains poulets
qui le vissent aux bras, l'escortent à cogner
le voleur tête basse crie pour y aller

l'avaleur bête tasse dans le fourgon foncé
les princes aériens et les benêts défoncés

Des perles de son, ironies de colères
couleurs des frissons, ivoire des rêves
des coulures froides déferlent sur la galère
et les gueules noires intronisent des grèves.